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mercredi 29 août 2018

LA FORMATION CONTINUE DES AVOCATS.


LA FORMATION CONTINUE DES AVOCATS

INTRODUCTION 

Dans leur ouvrage intitulé ‘’ Règles de la Profession d’Avocat’’, 14 édition, Dalloz, 2014, P.31, Henri ADER ET André DAMIEN, écrivent au sujet de l’histoire du Barreau que «  au lendemain de la guerre de 1914 – 1918 une mutation se marque au Barreau. Une mutation qui n’est d’ailleurs pas terminée. Elle est due à plusieurs facteurs ; d’une part l’hécatombe humaine effroyable qui entraine des désordres moraux et économiques sans précédent dans la Société Française, notamment ; d’autre part les bouleversements techniques des deux guerres :
-      Une civilisation de modération s’effondre brusquement et laisse apercevoir l’industrialisation et le machinisme galopant. La civilisation de l’automobile, du téléphone, de la rapidité apparente, du télégramme, commence à faire des ravages et, en même temps, la stabilité des fortunes s’effondre dans des crises économiques et monétaires. Le professionnel libéral exerce désormais un métier, la dureté de la vie rend inexorable l’aspect financier de son ministère et la décadence des fortunes entraîne des exigences économiques nouvelles.
Sans doute la perspective de construire une société mondialisée sera-t-elle encore pendant longtemps une force consommatrice de services juridiques.
Mais faudra-t-il des avocats pour les fournir ? Comme pour tous les secteurs d’activité, et à peu près tous les aspects de l’existence, les nouvelles technologies de l’’information affectent la production et la consommation des services juridiques sous divers angles, et il faut les envisager à la fois pour en mesurer l’impact sur la profession d’avocat telle qu’elle existe et pour en examiner ses chances de perdurer dans ce nouveau contexte où se profilerait un marché du droit sans avocats !
Richard Susskind, dans son ouvrage, the end of lawyers? Rethinking the nature of legal services oxford, oxford unversity press, 2è éd., 2010, P.269 pré disait que  ‘’ les avocats qui ne sont pas enclins  à changer leurs pratiques de travail et à étendre l’éventail de leurs services devront mener dans la prochaine décennie une âpre lutte pour leur survie’’.
En effet, le marché des services juridiques connait une transformation majeure ( l’ avocature sur internet), en passant d’un marché de l’offre , assis sur une position stable et sur la notabilité réelle ou supposée de ses acteurs, à un marché gouverné par la demande, inspiré par les logiques d’achat à moindre coût. Grâce ou à cause de la technologie, ce phénomène s’est accru considérablement, et il devra encore s’accroître avec pour conséquence de réduire ou même d’anéantir la distance et l’asymétrie existant entre le demandeur du droit et de justice et celui qui peut y pouvoir.
Or, on le sait, comme pour toute activité potentielle, c’est la distance et l’asymétrie qui sont à la source de l’activité de l’avocat : il se pose en intermédiaire obligé entre le public et le droit. Dès lors qu’il devient possible d’accéder sans intermédiaire à la connaissance voire à la technicité du droit applicable, sa fonction s’efface au point de s’évanouir.
Résilience de l’oralité, le statut de la connaissance s’en trouve altéré, passant d’un savoir hermétique, requérant ascèse instruction et expérience à un objet immédiat aussi accessible que n’importe quelle marchandise informative. L’économisme oblitère une attribution séculaire de l’Avocat, sa tâche sociétale de contribution à la justice et au bien public, dès par le lien personnel qu’il établit avec son client qui lui, choisit, tel avocat en qui il place sa confiance.
Des dispositifs à n’en point citer inondent  le marché : ODR (online dispute résolution), ADR (alter native dispute résolution), MARD, MARL, MARC (Modes amiables de règlement des différends, litiges ou des conflits).
L’adhésion de la RDC à l’OHADA  dont elle constitue le 17 Etat a apporté également un lot de bouleversements du confort de l’avocat, habitué à son droit napoléonien ou issu des décrets du roi souverain et autres arrêtés datant de l’ époque ante ou coloniale.
Ces actes uniformes qui n’ont de cesse d’être révisés priveraient du sommeil des avocats qui le découvrent à l’occasion du litige, chacun s’adonnant, à cœur joie, à l’interpréter, si les Juges n’en rajoutent pas de leur partition. Ballottée  entre les forces du marché et l’héritage de son passé, la profession d’avocat semble se trouver, comme partout ailleurs, à la croisée des chemins.
La réponse à ces nombreux défis d’adaptation sans  cesse aux mutations du droit et de notre monde passe par la formation initiale et continue, seule clé de sésame.
Quel est le dispositif légal et règlementaire dans notre droit en matière de formation (I) et quelles perspectives qui s’offrent à la profession (II), tels sont les deux points essentiels de ma présentation.
I.     LA FORMATION CONTINUE DES AVOCATS : Etat de la question
Deux articles (8 et 16) de la loi organique du Barreau renvoient à la formation initiale de l’avocat en ces termes : ‘’ (…) avant son inscription au tableau, l’avocat reçoit une formation professionnelle au cours d’un stage organisé (…)’’   ‘’ (…), le stage a pour but d’assurer la formation professionnelle. Il comporte la participation à des travaux et conférences organisés par le conseil de l’ordre, à la fréquentation des audiences et l’accomplissement des travaux effectifs inhérents à la profession sous le contrôle du maître de stage.
L’article 43 de la loi organique pré rappelée confie au Conseil de l’Ordre comme attributions notamment de veiller tout particulièrement à la formation des stagiaires. La décision CNO/4/87 du 09 Mai 1987 relative à l’enseignement des règles de formation professionnelle et déontologique à l’intention de tous les jeunes avocats participe de ce dispositif.
Le RIC lui, réserve, quasiment en queue du texte, quelques dispositions (art. 81, 84 et 85), encore une fois relèvent plus du stage que de la formation continue. Il convient de mentionner les dispositions de l’article 96, quoique au chapitre de bibliothèques, qui permet d’inférer l’obligation pour l’avocat de subir en permanence une formation.
Il se dégage de ceci un vide incompréhensible dans le dispositif, qu’il convient de combler.



II.   PERSPECTIVES ET PROPOSITIONS DE REFORME
Comme l’on peut s’en rendre compte, la formation continue assure la mise à jour et le perfectionnement des connaissances nécessaires à l’exercice de sa profession pour l’avocat inscrit au Tableau de l’Ordre.
Une telle obligation de formation continue est satisfaite notamment :  
1)   Par la participation à des actions de formation, à caractère juridique ou professionnel, dispensée par des centres de formation professionnelle agrées ou les établissements universitaires ;
2)   Par la participation à des formations dispensées par des avocats ou d’autres établissements d’enseignement ;
3)   Par l’assistance à des colloques ou à des conférences à caractère juridique ayant un lien avec l’activité professionnelle des avocats ;
4)   Par la dispense d’enseignements à caractère juridique ayant un lien avec l’activité professionnelle des avocats, dans un cadre universitaire ou professionnel ;
5)   Par la publication de travaux à caractère juridique.
Il suit dès lors qu’il convient de lege ferenda de rendre obligatoire la formation continue, quitte à ce que le CNO détermine la nature et la durée des activités susceptibles d’être validées au titre de l’obligation de formation continue et les barreaux de déterminer les modalités selon lesquelles elle s’accomplit.
A cet égard, la loi française n°71-1130, du 31 décembre 1971 sur l’exercice de la profession d’avocat, la décision à caractère normatif n° 2011-004 du 24 Novembre 2011 du Conseil National des Barreaux de France, de même que le Texte coordonné du code de déontologie de l’avocat (CODEON) et du Règlement Déontologique Bruxellois (RDB) mis à jour au 01.09.2015 pourraient se révéler particulièrement utiles à consulter.  
Il sied de signaler que l’article 29 du Règlement n° 05/CM/UEMOA relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace UEMOA du 25 Septembre 2014, entré en vigueur le 1èr janvier 2015 dispose : ‘’ la formation professionnelle initiale et continue est obligatoire pour tout avocat inscrit dans un Barreau de l’espace UEMOA, suivant les conditions et modalités définies dans un acte pris en application du présent Règlement et les règlements intérieurs des différents barreaux ‘’.
Cette obligation de formation continue devrait être renforcée par l’obligation de déclaration (par l’avocat) et de contrôle ( par le conseil de l’ordre), l’homologation des actions ou des établissements de formation par le CNO et la reconnaissance mutuelle des heures de formation continue d’autres Etats suivant une procédure et un référencement préétablis.
CONCLUSION
A n’en point douter, la formation continue de l’avocat est à la fois un défi à relever et un impératif catégorique dans le contexte actuel d’exercice de la profession d’avocat caractérisé  par une concurrence âpre, impitoyable, voire déloyale ainsi qu’à la révolution numérique.
C’est par elle que la profession toute entière doit passer pour adopter le format le plus adapté aux enjeux d’aujourd’hui et de demain notamment une offre à même de répondre à la demande de droit de plus en plus forte, exigeante et quasi universelle.
La confiance du public à l’avocat reste tributaire de sa capacité à répondre avec compétence et diligence aux problèmes que le client rencontre.
    Fait à Kananga, le 22/03/2016





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